Regards croisés : Valérie Zenatti / Aharon Appelfeld

Le garçon qui voulait dormir et Mensonges

l’Olivier
2011

Qu’est-ce qui lie ces deux écrivains ? La langue hébraïque.

Valérie Zenatti est la traductrice d’Aharon Appelfeld depuis qu’elle l’a découvert au moment de passer son agrégation d’hébreu à travers un de ses romans : « Le temps des prodiges ».

Le dernier livre d’Appelfeld est puissant. Il met à jour sa vocation d’écrivain et son rapport avec la langue hébraïque, qui n’est pas sa langue maternelle. Ce livre se déguste lentement tant il aborde des sujets universels : la guerre, les réfugiés, la reconstruction dans un lieu autre que celui de la naissance, la mémoire…

On y retrouve des éléments biographiques. Le narrateur Erwin, se retrouve dans un camp de réfugiés près de Naples. Il est enrôlé pour faire partie d’un groupe qui va partir en Palestine. Il apprend l’hébreu et est soumis à un entrainement sportif intensif. Il a besoin de dormir car dans son sommeil, il retrouve ses parents et sa langue maternelle.

En Palestine, il est envoyé au combat. Blessé aux jambes, il passe plus de deux ans entre les hôpitaux et une maison de convalescence. Là, il apprivoise les lettres hébraïques en recopiant des passages de la Bible de façon à maîtriser le trait. Mais cette démarche est mal vue : « Mieux vaut copier des passages du journal, tu apprendras ainsi le langage de tous les jours et de nouvelles idées. La Bible est enracinée dans un mode de vie ancien . » (page 218)

l’Olivier
2011

Dans le  : « Mensonges » (Editions de l’Olivier, 2011) de Valérie Zénatti, le premier texte « Apparences » se réfère à la vie d’Aharon Appelfeld. Il est né à Czenowitz (Bucovine alors rattachée à la Roumanie) en 1932. Il est déporté dans un camp à l’âge de huit ans. Il s’évade et se cache dans la forêt ukrainienne. Il est enrôlé par l’Armée rouge. En 1946 d’Italie, il embarque pour la Palestine. Il vit à Jérusalem.

Valérie Zénatti avait huit ans quand elle a découvert le génocide du peuple juif à travers le téléfilm américain : « Holocauste ». Elle ne s’en est jamais remise.

Née en 1970 dans une famille juive, Valérie Zenatti a émigré en Israël à l’âge de 13 ans. Avec sa famille, elle a vécu à Beer-Sheva, ville du sud d'Israël. De 1988 à 1990, elle effectue son service militaire comme toutes les jeunes Israéliennes de son âge. Elle revient en pour y suivre des études d’histoire et d’hébreu. Elle est d’abord journaliste, puis passe le Capes pour devenir professeur d’hébreu. Elle vit actuellement à Lille où elle enseigne cette langue. Depuis 1999, Valérie Zenatti écrit des romans pour la et pour les adultes.

« Mensonges » de Valérie Zenatti, que notre collègue Marianne a beaucoup aimé,  entremêle aussi des fragments biographiques contrairement à ce que pourrait laisser supposer son titre. Quand Valérie Zénatti arrive en Israël, elle apprend l’hébreu. Quand elle le parle son vocabulaire est limité, elle se sent bête. C’est en s’appropriant cette langue, qu’elle retrouve la capacité d’écrire en français.

Quand elle découvre « Le temps des prodiges » d’Appelfeld, Valérie Zénatti n’étudie pas, elle lit (p.48).

« Je n’étudie pas : je suis traversée par une voix, des images, un mystère insondable derrière des phrases pourtant limpides. (…)
Je suis sous le choc de la découverte. On appelle cela une rencontre » (p. 49)

Cette rencontre, elle continue aujourd’hui. En tant que traductrice, Valérie Zénatti voit régulièrement Aharon Appelfeld. Entre eux, une relation s’est tissée au fil des ans qui n’a pas toujours besoin des mots.

Retrouvez Mensonges dans les médiathèques d'Antony

Retrouvez Le garçon qui voulait dormir dans les médiathèques d'Antony


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