Les visages écrasés

Marin Ledin

 

Seuil
2010

Mal être au travail. Sentiment d’oppression, troubles du sommeil, maux de ventre, pleurs, dépression. Honte. Tentatives de suicides. Suicide. En série.La souffrance au travail, elle sait en parler, Carole Matthieu.En tant que médecin du travail dans une plate-forme d’un centre d’appels à Valence, elle voit défiler chaque jour des salariés qui viennent déverser leurs souffrances physiques et morales

Dopée elle-même aux tranquillisants pour tenir le coup, elle est confrontée sur son lieu de travail au décès par assassinat d’un de ses patients. Une enquête est ouverte pour déterminer les raisons de ce meurtre et trouver le ou la coupable de ce crime odieux qui a choqué tous les salariés de l’entreprise et qui a fragilisé encore plus des personnes déjà en détresse morale. Ce social, on ne le lâche pas tant il est proche de nous et se raccroche à une actualité chaque jour porteuse de la nouvelle d’un salarié qui s’est suicidé sur son lieu de travail.

 Ce noir, c’est la confrontation de deux mondes : ceux qui établissent les règles du travail avec des objectifs à atteindre et du chiffre à réaliser et ceux qui doivent répondre aux objectifs souvent inatteignables.Marin Ledun , docteur en sciences de l’information et de la communication, nous parle du monde du travail aujourd’hui, avec ce qu’il génère de souffrance au quotidien.Ingénieur en recherche et développement à télécom de 2000 à 2007, il connaît bien les pressions qui existent en période de restructuration et de mutations « forcées ».

Marin Ledun pose la question du monde du travail au XXIème siècle : « n’a-t-il pas réinventé de nouvelles formes d’aliénation encore pire que celles qui ont prévalu au XIXème et au XXème siècles ? »Les méthodes de management sont pointées du doigt. L’individu qui se referme sur lui-même, la peur d’en parler, la honte d’être mis sur le banc de touche font partie du processus d’une lente destruction de soi.

Les personnages

Carole Matthieu joue le rôle de contre-pouvoir dans l’entreprise : elle est salariée de l’entreprise, mais indépendante de sa hiérarchie qui la regarde d’un mauvais œil car elle est tenue par le secret médical. Elle aussi doit faire face à sa solitude. En tant que médecin du travail, elle est soucieuse de la santé de ses patients, mais là, elle a perdu sa raison d’être. Le Lieutenant de police Richard Revel a déjà été aperçu dans un autre de l’auteur intitulé « La guerre des vanités » paru en 2010. Il était le second de Korvine. Il reprend donc du service pour enquêter sur ce meurtre en entreprise. Un jeu de piste va démarrer entre l’assassin et le lieutenant. Mais qui sont les victimes ? Le bourreau n’est-il pas aussi une victime du système ?Entre mensonges et retour à la réalité, aux faits, ce noir est un véritable coup de cœur de début d’année.

 Les références

 Le titre du de Marin Ledun « Les visages écrasés »fait référence au « Vol de nuit » d’Antoine de Saint-Exupéry qui pose la question de la valeur de la vie humaine. Il est aussi question de Franca Madonia, « le soleil noir » de Louis Althusser, figure importante de la philosophie, découvreur de Jacques Lacan, qui assassina sa femme Hélène au cours d’une crise de démence.La folie remplit peu à peu les pages de ce noir qui nous prend à la gorge. Il nous laisse le sentiment d’un travail à accomplir par chacun d’entre nous pour empêcher que cela n’arrive encore.

 

Retrouvez ce roman dans les médiathèques d'Antony
 


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