Art nègre


Bruno Tessarech
2013

L’art nègre… Qu’est-ce que cela vous évoque ? : la sculpture, le cubisme, la musique, des étoffes et des tableaux colorés ? Dès le titre Bruno Tessarech s’amuse avec le lecteur et le pousse à regarder la quatrième de couverture. Surprise ! Nous voilà immergé dans l’univers des écrivains de l’ombre, des ghost writer, les nègres en écriture. Et le ton est donné : humoristique, léger, badin, lucide, empathique.

En nous racontant l’histoire de Louis, écrivain complexé et solitaire en panne d’inspiration, auquel un ami éditeur propose d’écrire pour les autres, Bruno Tessarech va nous parler d’un sujet qu’il connait bien et pour cause : il a écrit une vingtaine de livres pour les autres.

Nous avions eu le plaisir de le recevoir à la médiathèque Anne Fontaine en 2007 pour la parution de son roman Les sentinelles. Dans ce roman, il retraçait le destin tragique de personnes qui avaient tenté d'alerter sur les atrocités commises, notamment contre les Juifs, durant la deuxième guerre mondiale. Je vous en recommande vivement la lecture.

Mais revenons à notre « pauvre » Louis, rattrapé par la dure réalité de la vie : gagner de quoi subsister et si possible confortablement…. Du moins assez pour s’offrir une femme de ménage. Son appartement, à l’image de son existence n’est que désordre et poussières. Et les premiers pas dans le métier de nègre ne sont guère réjouissants : un criminel fade, un écologiste engagé, un chirurgien qui opère de la prostate et dont la vie est d’une platitude absolue.

Comment faire pour se sortir de ce marasme ? Une étincelle de génie : une farce. Quel piment l’auteur va-t-il trouver pour faire d’ennuyeuses « autobiographies », des récits codés aptes à amuser les lecteurs attentifs ? Des bombes vont-elles exploser ?

Et voilà le livre qui s’anime en une franche comédie où le lecteur est invité à jouer les Sherlock Holmes. Qui se cache derrière l’écologiste, l’académicien, l’ami comédien, l’ami éditeur ?

Depuis que j’ai lu ce livre, je lui trouve une résonance particulière avec la savoureuse comédie de Philippe de Broca Le diable par la queue. Pourquoi ?

Tout d’abord pour la fine équipe du film : Yves Montand, Jean Rochefort, Jean-Pierre Marielle, Maria Schell, Madeleine Renaud…dont l’un des interprètes pourrait bien être l’ami comédien de Louis. Et aussi pour l’histoire.

Louis n’arrive plus à écrire ni à ranger et à faire le ménage. Sa vie est un champ de ruines. Dans le diable par la queue, le château est délabré. Comment arriver à le restaurer ? C’est finalement le gangster joué par Yves Montant qui sauvera la famille et le château de la ruine. Dans Art nègre, c’est le copain éditeur qui propose un travail de nègre à Louis. D’une certaine manière, à une époque où l’on ne jure que par la transparence, le nègre en écriture est complice de l’éditeur qui transgresse les lois de la bienséance en faisant vendre le livre sans même mentionner le co-auteur. L’éditeur est le gangster mais il se rachète en faisant faire à l’écrivain une pause créatrice qui lui permettra de trouver un second souffle.

Le regard facétieux de Bruno Tessarech sur la vie et l’écriture est réjouissant.

Lisez ce livre sans plus attendre. Vive la littérature et vive la liberté !



Retrouvez ce roman dans les médiathèques d'Antony

Mots-clés ,

Partagez